Encore quelques mots sur Spector, total psycho taré ET génial maboul sonique qui vient de nous quitter.
Z
En prenant pour point de départ des petites pop-songs efficaces qu’il choisit surtout à l’instinct, Spector emploie une
méthode révolutionnaire afin de gonfler le son et créer un grain épique, d’une richesse intimidante.
Pour cela, l’accompagnement instrumental standard ne suffit pas.
Spector ne se contente pas d’une seule guitare rythmique, il lui en faut au minimum trois qui grattent les mêmes accords. Pareil pour les pianistes, il en faut plusieurs qui aient assez de patience pour marteler les mêmes touches pendant des heures et des heures d’enregistrement.
A cela, on ajoute deux ou trois basses, deux batteries sans les cymbales, et puis des violons, des saxophones, des harpes, des xylophones et j’en passe, en fait tant qu’il reste de la place dans le studio on peut en rajouter.
Et puis, si y’a un stagiaire qui passe par là parce que c’est le chemin pour aller aux chiottes, on le recrute immédiatement, on lui trouvera bien un truc à faire, il doit bien nous rester des maracas ou des clochettes ou un truc du genre, histoire d’atteindre des proportions délirantes.
En cours de route, beaucoup de ces musiciens finissent par claquer la porte, persuadés qu’on se fout de leur gueule et que Spector est un guignol qui ne sait pas ce qu’il fait.
D’autant plus qu’
il consacre un temps interminable à installer ses micros avec un soin maniaque avant d’en pousser le volume au maximum, ce qui est totalement impensable en studio. Les voix en revanche, il les enregistre séparément, et les mixe plus tard avec l’instrumental au cours d’un
processus compliqué qui voit les pistes faire des allers-retours insensés entre mono et stéréo. Si la conception du Mur de Son semble tout à fait absurde, le résultat convertit les plus sceptiques qui ne peuvent plus nier l’évidence :
Phil Spector est un génie, un véritable putain de génie.PS/ Lorsqu’un ami lui demanda un jour si toutes ces histoires de flingues en studio étaient vraiment arrivées, Phil Spector répondit en haussant les épaules : « Le problème, c’est que les gens ne comprennent pas mon humour »Spector peut déblatérer jusqu’à l’épuisement sans laisser personne en placer une, et ses convives sont condamnés à subir puisqu’ils ne peuvent pas partir, le producteur invoquant la présence de chiens féroces sur son terrain ou carrément de tireur d’élites armés de fusil sniper.
En 2003, il confiera au journaliste Mick Brown: "En pratique, je dirais que je suis, dans une certaine mesure, probablement relativement fou ». C'était quelques mois avant que l'on retrouve le cadavre de Lana Clarkson au domicile de Phil Spector.
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