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Vos disques de la semaine !

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Re: Vos disques de la semaine !

Message #181 par olivier-49 » 13 Fév 2020 à 15:56

Attention : grand disque !

The Music of Wayne Shorter, Jazz at Lincoln Center Orchestra with Wynton Marsalis, 31 janvier 2020
Wayne Shorter ! Prosternons-nous, chers amis, devant ce géant du jazz. Si l’on vous dit saxophone ténor, vous penserez, à juste titre, à John Coltrane ou Sonny Rollins, ses aînés de quelques années, statues indéboulonnables de l’histoire du jazz et de son instrument sans doute le plus emblématique. Mais Wayne a un statut à part. Pour plein de raisons. Le nombre d’aventures diverses, de styles et de musiciens qu’il a côtoyés est impressionnant. Je vous fais une liste ? Jazz Messengers, Miles Davis,  Weather Report, Joni Mitchell, Milton Nascimento, Herbie Hancock, Santana, Steely Dan, et j’en passe.

Et puis, autant qu’un interprète unique, il est un compositeur majeur. L’un des plus inspirés de l’histoire du jazz, capable de développer des thèmes d’une incroyable richesse harmonique et rythmique, et sans qui Miles n’aurait pas été le même Miles. « C’est l’homme des idées, le concepteur d’innombrables innovations musicales. Moi je ne suis que le leader qui les met en scène », dira-t-il avec une humilité inhabituelle de sa part.

En tant que soliste, il est héritier de Coltrane, mais là où ce dernier creuse, au plus profond, fouillant l’abîme en cherchant le ciel, Wayne s’étale, tel un delta, en ramifications inattendues, fouillant l’espace, atteignant l'azur. Je ne peux m’empêcher, en écoutant certains de ses solos de soprano, comme miraculeusement en équilibre sur un fil, de penser à la phrase de Rimbaud « J'ai tendu des cordes de clocher à clocher ; des guirlandes de fenêtre à fenêtre ; des chaînes d'or d'étoile à étoile, et je danse ». Sa musique ruisselle de son être : c’est un esthète autant qu’un homme d’une grande profondeur humaine et spirituelle.
Et que dire du son de Wayne ? A la fois souple et tranchant, lyrique et aérien, incroyablement nuancé, de la caresse au cri, il suffit à mettre à genoux l’auditeur le plus blasé qui le reconnaît entre mille, que ce soit au ténor ou au soprano. Comme le dit Wynton Marsalis « Chacun se bat pour trouver un son personnel, son son à lui est définitif ».

Bref, Wayne Shorter est une légende. Il a maintenant 86 ans, et porte inévitablement le poids des ans, mais quand ce disque, issu de trois concerts, a été enregistré en 2015, il n’en avait « que » 81 et vous n’allez pas le croire. Il s’agit donc là d’un enregistrement du « Jazz at Lincoln Center Orchestra » dirigé par Wynton Marsalis. Une série de concerts reprenant dix des compositions de Shorter, réarrangées pour grand orchestre par plusieurs des membres du groupe. C’est tout simplement brillantissime. Imaginez. Un grand orchestre de jazz, aussi compétent que celui-ci, c’est juste comme un moteur de Rolls-Royce parfaitement huilé : grand confort, jamais une panne, la jouissance pullman. Les arrangements sont magnifiques, Wayne est étonnamment en forme, à l’aise, volubile. Comme rajeuni. Il se glisse dans la nouvelle orchestration de sa musique et la transfigure avec aisance. Ce disque est déjà un classique, un chef d’œuvre magistral. Il me rappelle inévitablement le splendide « Miles & Quincy, Live at Montreux » de 1991 dans lequel Miles avait accepté, peu avant sa mort, de jouer en concert, avec un grand orchestre dirigé par Quincy Jones, quelques uns de ses anciens morceaux. Délaissant l’électricité et le funk un peu facile de ses dernières années, il avait gravé là un témoignage étonnant de son art et d’une maîtrise instrumentale qu’on ne lui connaissait plus.
Est-ce là, de même, pour Wayne Shorter, à la fois un hommage et un chant du cygne ? Voici, en tout cas, un disque référence. Indispensable.

Documentaire et entrevue avec le bonhomme :

     

Et, attention, cadeau : voici, filmés, ces moments aussi fabuleux à voir qu’a écouter, deux sets d’une heure chacun.



Dernière édition par olivier-49 le 16 Fév 2020 à 21:55, édité 1 fois.
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #182 par Tiamat » 15 Fév 2020 à 16:11

Sortie le 7 février du dernier YGGL...one man band de Biarritz dans la veine de Jessica 93 avec un son plus shoegaze/poste punk que cold wave, proche de Viet Cong/Preoccupations...énorme sur scène, avec une bonne promo, il devrait littéralement crever les plafonds  :eek:  :eek:  :eek:

https://www.youtube.com/watch?v=9vj5PGL ... 71qBESK0m0



Premier album :
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #183 par mkl » 15 Fév 2020 à 17:39

Merci pour la découverte. :cool:
J'aime les gens qui doutent.
“It's entertainment, not dialysis.” (Nelson Pass)
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #184 par pierrebour1 » 15 Fév 2020 à 20:27

j'aime bien viet cong donc je vais y jeter une oreille attentive :wink:
rétromaniaque un jour,rétromaniaque toujours.
Pauvres choupinets ...De toute manière, vous utilisez ces trucs de gosses pour streamer ...
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #185 par olivier-49 » 30 Avr 2020 à 12:52

Les confinés parlent aux confinés.
C'est bizarre, j'ai l'impression que le temps s'est arrêté et qu'on nous offre une parenthèse de vie en plus, un bonus gratuit en quelque sorte. Mais quelqu’un m'a appris récemment que, non, ce n'était pas "en plus".Il semblerait que ce soit retranché du total. Bon, alors, je me grouille, voici quelques babioles à se mettre dans l'oreille avant d'y passer. Je vous fais février et mars. J'en ai d'autres pour avril. Ça arrive !

Raveena, « Moonstone » (EP) 7 février 2020
J’avais salué la sortie de « Lucid » son très réussi premier LP en mai dernier. Voici donc que la jeune Américaine de descendance indienne (des Indes) vient de nouveau nous hypnotiser de sa soul rêveuse. On pense inéluctablement à Marvin Gaye ou à Smokey Robinson. La voix est un volute de douceur qui serpente au-dessus d’une rythmique que l’on dirait issue de chez Tamla. Cinq titres à laisser fondre lentement dans les oreilles.




L’Estro d’Orfeo, « L’Arte Di Diminuire », 6 mars 2020
Ça faisait longtemps que je n’avais pas eu l’occasion d’entendre un disque de musique ancienne, ou même baroque, qui me ravisse autant. Le titre parle de lui-même, il s’agit de l ‘art de la « diminution ». Art qui faisait partie intégrante de la musique des seizième et dix-septième siècle. Je ne suis pas musicologue, mais ce que j’en retiens c’est que, à cette époque, c’est l’interprétation autant que la composition qui faisait la pièce. Tout n’étant pas noté, c’est le musicien qui « embellissait » la mélodie. « Cela consiste à improviser (où à écrire) l’ornementation d’une mélodie en remplissant l’intervalle entre deux notes longues par des guirlandes de notes plus courtes qui tournent autour de la mélodie originale » écrit Cécile Glaenzer, sur le site Res Musica.
En tout cas, puisque liberté était donnée à l’interprète, ici ce sont les musiciens du petit ensemble L’Estro d’Orfeo, et en particulier leur violoniste, Leonor de Lera, qui s’en donnent à cœur joie. Ça virevolte, ça foisonne, ça chante, ça caresse, et c’est parfois beau à pleurer.
Sur une bonne chaîne, ces timbres (violon ancien, viole, théorbe, clavecin) sont particulièrement « régalants ». En plus si vous y mettez les bonnes Spendor, je vous dis pas le bonheur.







Nadia Reid, « Out of My Province », 6 mars 2020
Une sorte de Joni Mitchell néo-zélandaise ? Découverte en 2015 grâce à son premier disque, confirmée et saluée pour son second, elle vient de sortir le troisième, le bien nommé « Out of My Province », puisqu’elle s’est installée aux États-Unis après avoir quitté la Nouvelle-Zélande de son cœur . Écrit lors de la tournée qui a suivi le précédent album, celui-ci est donc marqué par la route, le voyage, la volonté de ne pas rester immobile. On peut classer Nadia dans la case folk, mais, tout comme pour Joni, ça ne suffira pas. On s’imprègne lentement de ce beau disque intime, accompagné de sa voix magnifique, vibrante et émouvante, discrètement émouvante. Il est des artistes qui n’ont pas besoin de forcer le trait pour vous percer au cœur.






Yael Naim
, "Nightsongs", 20 mars 2020
Au temps pour moi, je ne connaissais pas Yael Naim. Ou seulement de nom. Oui, OK, « New Soul », j’avais entendu, mais je ne savais même pas qui chantait cette ritournelle charmante et bien faite que j’entendais à la radio dans ma voiture. Faut dire que toutes les petites jeunettes de la variétoche française, bof bof. Quelle erreur ! Quelle sinistre erreur ! J’avoue, je me confesse, c’est mal, pardonnez-moi. D’abord, ce n’est pas de la variété française, elle est assez internationale puisqu’elle est franco-israélienne, qu’elle chante en anglais, qu'elle semble être reconnue dans pas mal de pays et, ensuite, parce que ce disque vole très très haut, très au-delà des simagrées et des petites habitudes étriquées de la « variété ». De plus, ce disque a une histoire singulière. Elle décide de trancher avec ses habitudes, avec ceux avec qui elle travaillait jusqu’alors. Elle se lance dans une aventure solitaire, nocturne, introspective, libératrice. Elle travaille la nuit, seule. Pendant trois ans. Un disque de confinée, en sorte. Il en sort cette splendeur, ce murmure intime, fragile comme la lueur d’une bougie et qui pourtant vient nous irradier de sa lumière pendant notre propre confinement. Pas de batterie, ni de boîte à rythme, juste sa voix comme un rayon au dessus d’un brouillard, des nappes dont on ne cherche pas à reconnaître l’origine (principalement un chœur, des claviers, quelques cuivres ouatés, une guitare parfois). On plonge, on s’envole, le temps s’arrête.
Mais ces douze chansons racontent une histoire, celle d’une remise en cause, d’une recherche de soi, d’une interrogation sur l’amour et, somme toute, d’un âpre combat, mais qui finit par un espoir « I‘ll try to find a way / A way to fly / But yet to stay / I’ll try to find a way ». Un disque marquant, à la fois douloureux et lumineux.
Elle dit (dans le Parisien) : « C'est fou ce qu'elles font écho dans cette période. Tout l'album fait écho, car je l'ai moi-même créé dans une sorte de confinement. La plupart des chansons sont nées la nuit. Toute ma démarche a été de ralentir et de se retrouver seul, de sortir de l'autoroute et se demander après qui on court ? Décidément, il a un drôle de destin, ce disque. »



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Re: Vos disques de la semaine !

Message #186 par olivier-49 » 06 Mai 2020 à 19:08

Allez on arrive tranquillement en avril avec deux disques en mode je me confine relax.

Laila Biali, « Out of Dust », 27 mars 2020
C’est juste de la bonne musique et elle chante bien. Pas de révolution, ici, mais du plaisir. Le caractère franchement soul du premier morceau (Revival) ferait pencher pour une peau tendance black, mais non elle est bien blanche. Et canadienne. Ensuite, ça se balade tranquillement, cool, sur balancement rythmique jazzy-pop. D’ailleurs la dame est étiquetée jazz. Pianiste et chanteuse. Pas de « chabada » pur et dur cependant. Pas mal de ballades, de jolies trouvailles mélodiques, un gentil swing (The Monolith, Sugar, The Baker’s Daughter...), un assaisonnement ponctuels de cordes (Alpha Waves, Au Pays de Cocagne…) et une belle voix chaleureuse. Un bon moment à passer. Pourquoi se priver ?




Curtis Stigers, « Gentleman », 10 avril 2020
Entre soul et jazz, entre jazz et blues, Curtis Stigers - qui chante depuis plus de 20 ans parait-il ! - nous offre un disque de grand style. Une musique bien habillée, élégante, chaleureuse, chaloupée,  et un brin nostalgique. La voix est profonde, traînante juste ce qu’il faut, évoquant parfois Ray Charles ou Van Morrison, par exemple. Un disque sans excès, toujours classe, idéal pour siroter un whisky dans son fauteuil solitaire, tout en regardant la ville la nuit, en contre-bas, par la baie vitrée. Ou pour danser sans rien dire, serré contre cette amoureuse à qui, et la musique nous le susurre à l’oreille, on est toujours attaché après vint ans. Clichés de cinéma, clichés de la vie, style de gentleman.

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Re: Vos disques de la semaine !

Message #187 par olivier-49 » 09 Mai 2020 à 11:22

Ron Sesmith, Hermitage, 17 avril 2020
Ah revoilà mon pote Ron ! Il ne le sait pas mais ça fait 25 ans qu’on est pote. Le genre de gars, quand tu le découvres, tu l’aimes tout de suite. Un petit bonhomme joufflu qui ne ferait pas de mal à une mouche et qui te pond, à chaque disque, des ritournelles si bien ficelées mélodiquement et harmoniquement que tu le classes illico dans une lignée Beatlesienne. Ses amours : les Kinks (c’est dire!), Elliott Smith ou Johnny Cash. Une sorte de mixture américano-britannique. Lui est canadien. Il était de Toronto mais vient de déménager à la campagne et ça s’entend.
Sa voix, nonchalante, traînant une sorte de mélancolie discrète, sans artifice ni triche, devient vite familière et attachante.
Vous croyez ne pas connaître Ron Sexsmith ? Parmi ses fans, Elvis Costello lui-même, une garantie d’orfèvre. Et vous avez peut-être déjà entendu « Secret Heart ». Mais si enfin, « Secret Heart » ! Par Feist ou Rod Stewart…
« Hermitage » est-il son meilleur disque ? Sans doute que non. Mais a-t-on entendu Ron faire un mauvais disque ?  C’est un album qu’on pourrait qualifier de champêtre et plutôt détendu. Il a fait ça simple, sans chichi, moins « arrangé » que d’habitude (je crois qu'il a joué tous les instruments lui-même, sauf la batterie, chez lui) mais toujours aussi ciselé, avec cette honteuse facilité déconcertante à trouver la mélodie qui tue. Ça chante, c’est juste sincère et ça fait du bien. Comme d’hab avec mon pote Ron.


Le premier morceau est introduit par des chants d’oiseaux. Si mon oreille est bonne un guêpier et un rossignol. Et ça s’appelle « Spring of the Following Year » ! Si ! Comme si Ron avait prévu que celui de cette année serait un peu raté ! Sacré Ron !



Tiens, en bonus je vous mets son irrésistible Secret Heart (1995).



Et son merveilleux « Gold in Them Hills » (2002) ! Là je vous gâte.

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Re: Vos disques de la semaine !

Message #188 par cheffois » 09 Mai 2020 à 12:05

Merci voisin pour ces découvertes
"j'ai vu tant de choses que vous humains ne pourriez pas croire.
De grands navires en feux surgissant de l'epaule d'Orion.
J'ai vu des rayons fabuleux. Des rayons C briller dans l'ombre de la porte de Tannhauser.
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #189 par olivier-49 » 11 Mai 2020 à 18:19

Merci voisin ! Super, j'ai un lecteur !

On continue ?

The Lowest Pair, « The Perfect Plan », 24 avril 2020
Voilà le charme des sites de streaming, quoi qu’on en dise : Ils vous permettent d’explorer toutes les musiques du monde, celles que vous aviez oubliées, celles que vous ne connaissiez pas et celles qui sortent chaque semaine. C’est de ces dernières qu’il s’agit dans ce fil. Quand vous êtes un peu curieux et aventureux, vous cliquez au hasard sur des noms dont vous n’avez jamais entendu parler et parfois, bingo ! The Lowest Pair. C’est un duo, un gars, une fille, classés dans le Folk, c'est leur héritage. Tendance américaine, les santiags dans le foin, la tête dans les étoiles. On est d’abord un peu dérouté par la voix féminine. Pas rassuré quand les banjos se mettent à sonner. Puis, ça monte en intensité, il se passe un truc, on est happé. On pense à un autre duo, les merveilleux Angus & Julia Stone. C’est ça, elle rappelle un peu Julia, en plus nasillard, certes, mais l’émotion est aussi palpable. La production a fait du beau travail, mêlant tradition et modernité, arpèges délicats et gros son, touches de banjo et nappes d'orgue, et quand arrive « Wild Animals », on n’est plus dans le Folk, ou alors dans du Punk Folk, entraîné dans une espèce de mélopée répétitive, de ronde tourbillonnante, d’une force incroyable. Même pas peur du gros son. Étonnant.



Ils ont sorti cette chanson en single. Plus j'écoute, plus je ressens cette énergie :
https://soundcloud.com/the-lowest-pair/too-late-babe
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #190 par olivier-49 » 13 Mai 2020 à 12:10

RVG, « Feral », 24 avril 2020
Le chanteur est une chanteuse. Ou l’inverse. Il porte des robes et elle chante comme un homme. Enfin, c’est pas grave. Romy est transgenre, né homme, s’identifiant femme. La musique qu’ il/elle crée avec le groupe qu’il a baptisé des initiales de son nom, porte en elle la brûlure d’une fièvre contagieuse. Voici un disque fort, émotionnellement et musicalement. Les cendres des Byrds (mythe années 60) et de Television (mythe années 70) sont encore chaudes. Guitares claires et acérées, musique tendue, nerveuse, urgente, ce disque est une éclaboussure dans la mare du conformisme ambiant. Qu’il est bon de vibrer de nouveau sur ce qui a fait la base de la révolution rock et le bonheur inoubliable de notre jeunesse, un groupe de guitares !  D’autant plus que trois ou quatre de ces morceaux s’imposent, quasi sur le champ, comme d’intenses chefs d’œuvre, douloureuse fusion de la magnificence incendiaire des guitares et de la cruelle noirceur des paroles. Un sacré choc.



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Re: Vos disques de la semaine !

Message #191 par olivier-49 » 16 Oct 2020 à 22:45

J'arriiiiiive !

Oui, ça faisait longtemps. Mais j'écoute toujours de la musique, et parfois je fais des découvertes et parfois, il me plait de les partager. Et puis, à mon âge, c'est bon de faire un peu d'exercice. Surtout que là, très récemment, quelques sorties m'ont prouvé que j'étais encore capable de bouger mes gambettes ou de de ressentir quelques frissons intérieurs.
Un peu de patience, commençons par le commencement et reprenons au mois de mai !

Nico, « BBC Session 1971 », 8 mai 2020
Quatre chansons, tirées de ses trois albums les plus importants et interprétées ici comme elle le faisait sur scène, toute seule, avec son harmonium indien. Une sorte de mini-live donc mais dans les studios de la BBC. On a donc le feeling du live, la présence, ce petit quelque chose qui rend l’artiste proche et fragile, et en même temps (comme dirait l’autre) le son soigné de la BBC. Nico, comme descendue de l’Olympe, sa silhouette hiératique, sa voix (pas toujours juste) caressant le marbre de sa poésie, les mélodies venues de son ailleurs, c’étaient quand même des moments très particuliers, uniques, intenses. Ces « chansons » (peut-on employer ce mot ? – ce sont presque des cérémonies), on les a entendues des dizaines de fois, mais je ne pouvais passer sous silence ce beau document. Rest in Peace, ma belle.





Bianco White, « On the Other Side » ( juin 2020
Si vous aimez Melanie Di Biasio, vous pourrez aimer Blanco White. Sa musique s’étale, lente, presque aussi immobile que ses clips qui s’étirent dans des déserts vides. Portée par cette voix étrange, étranglée, mi homme-mi femme, un peu comme celle de JS Ondara (ou alors essayez d'imaginer Nina Simone homme), elle est assez prenante. On se dit que le bonhomme doit avoir pas mal de choses qui se bousculent dans sa tête. Bon, c’est pas gai-gai, mais si vous êtes en mode introspection-y’a  pas que la poilade dans la vie, fermez les yeux, ça peut le faire, vous avez le droit de trouver ça beau.




Soko, « Feel Feelings » (10 juillet 2020)
Quand j’ai entendu l’intro du premier morceau, « Are you a Magician ? », je suis tombé le cul sur mon fauteuil, scotché juste en face des enceintes, et mes oreilles ont dit « Putain, ça sonne ce truc ! ». Ces accords de guitare tranchants, joliment réverbérés, cette basse lourde mais parfaitement détourée, cette batterie sèche, cet espace incroyable, le genre d’intro qui dresse l’oreille de l’audiophile qui se cache dans le mélomane. Ou l’inverse. Ah et puis, n’oublions pas, il y a Soko, la voix un peu ado, électroniquement doublée, qui vous susurre des trucs bizarres comme dans un rêve. Alors, n’étant plus ado, il a fallu que je me renseigne sur cette étrange petite personne. Première surprise, elle est Française - de Bordeaux. Deuxième surprise, elle est actrice et a déjà tourné dans des films reconnus. Troisième élément, moins surprenant quand on se plonge dans son univers musical, elle a eu des secousses dans sa petite vie. Être témoin de la mort soudaine de son père (rupture d’anévrisme) alors qu’on a 5 ans, ça secoue forcément. Elle a confié être envahie de cauchemars et de pensées morbides. Je vous demande pas de la prendre en pitié mais si vous écoutez son disque, vous pourrez, comme moi, être happé par cette ambiance cotonneuse très personnelle, par une musique originale produite de manière très anglo-saxonne (elle habite Los Angeles), par cette forte personnalité à l’hyper sensibilité évidente. Touchante pour un type de mon âge.




Samantha Crain, « A Small Death » (17 juillet 2020)
Bon, décidément, c’est pas que j’aime spécialement les atmosphères plombantes ou les artistes torturés, mais là, ça va faire beaucoup ! Y’a un virus, ou quoi ? Alors, celle-ci, elle est amérindienne Choctaw, et s’est payé trois accidents de voiture en trois mois durant l’année 2017. Oups. Après une longue période de souffrances physiques et mentales, elle renaît avec cet album, « Une Petite Morts ». Un titre qui signifie sans doute que l’Indienne y a laissé quelques plumes. Bon, d’accord, c’est pas gai-gai tout ça, mais la renaissance est là, et c’est tant mieux. On pense parfois à Jeff Buckley (« An Echo »), les origines sont folk-rock, la voix est poignante, elle dégage vraiment un truc, et c’est beau. Et surtout, ne vous privez pas de regarder ses interprétations live sur YouTube. La production un peu lissée du disque ne rend pas justice à la puissance émotionnelle incroyable de sa voix. Au final voici un disque qui semble arrondir les angles et gommer la force d’une artiste authentique et magnifique. Il nous oblige à creuser le sillon pour trouver la chair.  

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Re: Vos disques de la semaine !

Message #192 par JérômeB » 16 Oct 2020 à 23:13

Je n'aime pas tout, mais merci pour le partage.  :wink:

-- 16 Oct 2020 à 23:26 --

Ca ne date pas de la semaine puisque cet artiste a, depuis, achevé sa transition sexuelle pour devenir Anohni.










PS. C'est Ugo qui me l'avait fait découvrir.
JérômeB

Dis donc Moska, tu me renvoies Monique ?

Atelier d'initiation à la Photo
Mon siiiiite.
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #193 par olivier-49 » 01 Nov 2020 à 22:40

Merci au petit JérômeB pour sa gentille contribution. Cependant, ce fil étant consacré aux sorties de disques, c'est à dire aux disques qui viennent de sortir, d'où le nom "Vos disques de la semaine", je lui fais très gentiment remarquer qu'il est légèrement hors-sujet, mais que nous accueillerons avec un grand plaisir davantage de contributions de sa part, si elles respectent le sujet traité ici et que je viens d'essayer d'expliquer. Sinon, malgré toute la sympathie que l'on peut apporter à sa tentative, nous serions obligés de prévenir un modérateur.  :mrgreen:

Bon... je sais, l'exemple suivant n'est pas absolument le bon pour servir d'exemple, puisque ce coffret est sorti en juillet  :redface: J'ai un peu de retard, mais le confinement va m'aider à le rattraper !


Beethoven « Révolution, Symphonies 1 à 5 », Jordi Savall, Le Concert des Nations, 17 juillet 2020
On est sans doute nombreux à avoir admiré le travail de Jordi Savall dans la musique ancienne et, en particulier, dans la musique pour viole qu’il a contribué à faire connaître et aimer. Souvenons-nous de « Tous les Matins du Monde ». Mais ce travailleur acharné ne s’est pas arrêté là, il a depuis servi beaucoup de musiques et, après Bach, Vivaldi ou Haendel, par exemple, le voici maintenant dans Beethoven. Ce coffret des 5 premières Symphonies est sorti au mois de juillet. Je ne suis pas musicologue et c’est donc en simple mélomane que je livre ici quelques impressions, car ces interprétations m’ont suffisamment séduit pour que je classe ce coffret parmi mes « disques de la semaine » (avec un peu de retard…).
J’ai la sensation ici de redécouvrir Beethoven, de réentendre sa musique, et c’est assez rafraîchissant, pour ne pas dire étonnant. Dans la 5ème symphonie, celle que l’on connaît le mieux, je suis frappé par le côté vivant et chantant de cette musique, dans laquelle Ludwig n’a jamais hésité sur la masse orchestrale. On est loin de la vision lourde et ampoulée qu’on pourrait avoir de ces symphonies. L’oreille est attirée par l’aération de l’espace, par le côté fruité des timbres (instruments d'époque), par le jeu des dialogues entre les tutti et les motifs plus « soli », par la grande rigueur rythmique et le tranchant des syncopes, par le jeu des nuances admirablement mises en valeur par le chef, par la lisibilité. Ça chante, ça respire, ça donne envie de suivre l’histoire, et cela me ferait écouter cette version plus facilement que je n’écouterais, par exemple, la pourtant magnifique interprétation de Riccardo Chailly, qui aère moins les pupitres, donne davantage d’unité et de puissance à la masse orchestrale et laisse moins de place à la surprise.
Après, tout est question de goût et de sensibilité, mais j’aime la relecture que font les « baroqueux », ou du moins ce qu’on appelait ainsi au début de leurs audaces, des grandes œuvres plus classiques du répertoire. Les Noces de Figaro par René Jacobs, par exemple, m’avait carrément soulevé. Go Jordi, go ! J’attends impatiemment tes interprétations des dernières symphonies !


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Re: Vos disques de la semaine !

Message #194 par olivier-49 » 12 Nov 2020 à 20:08

L'aventure continue. Confinez-vous et écoutez de la musique ! Nous voici en août !

Siv Jakobsen, « A Temporary Soothing », 21 août 2020
Une bien jolie chose que ce disque d’une jeune norvégienne, à classer entre pop minimaliste et folk de velours. D’emblée, ce qui séduit et la rend sympathique, c’est cette totale absence de frime, cette humble authenticité. Sa musique s’impose sans effort apparent, au cours du déroulement tranquille de ces 12 chansons sensibles et fragiles. Sa voix, un peu acidulée, qui ne manque ni de chaleur ni de douceur, nous piège sous son charme. Y a-t-il des points communs entre ces artistes scandinaves qu’on a pu connaître ? En les écoutant j’ai facilement des images de lacs immobiles sous le froid, de grands ciels aux couleurs pastel, d’espaces silencieux où crier ne sert à rien. Je pense aux Kings of Convenience, ce duo magnifique, également venu de Norvège, parfaite expression de cette discrétion pleine de grâce, de cette lumière pâle et enchantée, de cet équilibre merveilleux entre minimalisme et plénitude que l’on peut ressentir au contact de ces paysages, qu’ils soient terrestres ou musicaux. Au cours d’une période usante de tournées à n’en plus finir, Siv Jakobsen a ressenti le besoin de s’arrêter pour faire un break. « A Temporary Soothing », un réconfort provisoire, en est sorti, C’est toujours bon à prendre.



(Ah ah, manque de bol, la vidéo semble avoir été tournée au Japon!)
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #195 par olivier-49 » 13 Nov 2020 à 18:13

Bettye Lavette, « Blackbirds », 28 aout 2020
Vous aimez Billie Holiday, vous frissonnez en écoutant Etta James ? Vous êtes sensibles à ces voix typiquement noires, puissantes, déchirées, qui portent toute la misère du monde , et en particulier les souffrances du peuple noir ? Essayez Bettye Lavette. Dommage son disque manque d’unité. Tout n’est pas au même niveau. Elle et son équipe se contentent ici de reprendre, de manière un peu conformiste, une collection de chansons précédemment éprouvées par des grands noms comme Nina Simone, Dinah Washington et… Billie Holiday. Si. Elle ose reprendre « Strange Fruit ». Version sobre qui n’ajoutera rien à la légende de cet hymne douloureux dénonçant la haine raciale. Ah oui, elle parvient même à injecter une grosse dose de pathos dans le gracieux Blackbird de McCartney pour en faire une chanson d’espoir pour la libération des noirs... Mais bon, rien que pour la voix et pour le puissant blues d’ouverture, certains seront séduits par cet album. Sinon, mon conseil, jetez votre dévolu sur son précédent album, « Things Have Changed » de 2018, qui reprend Dylan. Dylan, c’est universel, non ? Et bien en soul/funk, ça cause plutôt ! On sent Bettye plus à l’aise, plus investie, c’est beaucoup plus carré, vraiment convaincant. Bon, elle n’avait que 72 ans alors…



Allez, cadeau, Dylan revu par la Madame :

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Re: Vos disques de la semaine !

Message #196 par reglisse » 13 Nov 2020 à 18:37

Les deux sont bons.
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #197 par olivier-49 » 13 Nov 2020 à 23:35

Tu veux dire les deux disques ou les deux vidéos ? Les deux vidéos, ok. Les deux disques, eux, ne sont pas de même niveau. En fait, je me suis même un peu ennuyé en ré-écoutant le dernier pour écrire mon petit commentaire. Sauf sur ce morceau "I Hold no Grudge", le blues d'ouverture que je mentionnais.
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #198 par NAFI » 13 Nov 2020 à 23:54

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Re: Vos disques de la semaine !

Message #199 par olivier-49 » 14 Nov 2020 à 12:14

Je ne connaissais pas Christophe Marguet, je vais jeter une oreille, merci.
Douze titres sur cet album paru le 27 mars 2020. Tu as encore plus de retard que moi !  :mrgreen:
L'actualité fuit mais la musique reste.
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Re: Vos disques de la semaine !

Message #200 par NAFI » 14 Nov 2020 à 13:40

olivier-49 a écrit:Je ne connaissais pas Christophe Marguet, je vais jeter une oreille, merci.
Douze titres sur cet album paru le 27 mars 2020. Tu as encore plus de retard que moi !  :mrgreen:
L'actualité fuit mais la musique reste.

Bôh, entendu hier sur Radio Clapas dans la voiture.
Rien n'est trop tard, comme celui-ci decovert  sur FIP
sjr-lp455-kaleidoscope-triple-sleevenew.jpg

Commandé les deux -en CD qui ne s'usent pas, ou peu du moins-
Ferai CR plus tard, ou pas.
JP
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