Keith jarrett: petit guide de survie discographique

[pat55]

Petit guide de survie pour ne pas s’égarer dans la luxuriante forêt discographique (+ de 80 albums) du pianiste, unique star actuelle du jazz.
(bien sûr, ce guide est parfaitement contestable mais je vous le livre tout de même)

Si l’on ne devait en garder qu’un seul : sautez votre tour sans passer par la case départ. N’avoir qu’un seul album de Keith Jarrett, ce serait comme n’avoir qu’un seul album de Miles Davis, de JS Bach ou des Beatles, vaut encore mieux ne rien avoir du tout.

Si l’on ne devait en garder que 5 : Là, on peut commencer à discuter. La carrière du pianiste se divise grosso-modo en 4 formations distinctes se recoupant de temps à autres : quartet Americain et quartet Européen dans les années 70, le célèbre trio avec Jack Dejohnette à la batterie et Gary Peacock à la basse depuis 1983 et, courant sur toute sa carrière, les albums solos.

Le plus célèbre d’entre eux, “The Köln Concert“ de 1975, enregistré sur un piano pourri, Jarrett  n’acceptant de jouer et d’enregistrer que pour les beaux yeux de l’organisatrice. On connaît la suite. Album d’une époque, vendu à plus de 3 millions d’exemplaire, boudé par certains (consensuel, facile, forçant le trait, …) mais indispensable. Le concert s’ouvre sur quatre notes désormais portées à la postérité, en fait la sonnerie de rappel de la salle de concert de Cologne reprise au piano, quatre notes qui projetterons les spectateurs dans un univers musical inconnu jusque là. Autre album indispensable, le plus beau à mes yeux, apothéose du quartet Américain, Charlie Haden à la basse, Paul Motian à la batterie et Dewey Redman au saxo, édité en 1977, “The Survivor’s Suite“, longue suite orchestrale empreinte de spiritualité, cérémonial majestueux en deux parties, “Beginning“ et “Conclusion“, sur lequel, en une avancée inexorable,  on voit se construire pas à pas un paysage musical grandiose et d’une beauté saisissante.

En 1983, retour aux fondamentaux avec deux albums sobrement intitulés Standards vol 1 et vol 2, regroupés désormais en un coffret. Ces deux albums jumeaux ne se contentent pas de moderniser et de dispenser une lecture revigorante de classiques du jazz qui fera date, ils célèbrent aussi en fanfare le début d’une autre grande histoire de Keith Jarrett, celle d’un trio exceptionnel de longévité et de complémentarité avec Dejohnette et Peacock, débuté en 1983 et qui semble désormais être terminé si l’on en croit un interview accordé à Jazz Magazine en 2015 où le pianiste explique qu’en raison de la surdité de Gary Peacock, il préfère arrêter la formule. Il semble pourtant que le sourdingue ne l’entende pas de cette oreille puisqu’il sortira la même année un album réjouissant, le formidable “Now This“ en trio (avec cette fois Marc Copland et Joey Baron) sur le même label, ECM.

     Prenez “Köln Concert“ et déclinez le pour trio, le même trio susmentionné et vous obtiendrez  “Changeless“, aussi lyrique, aussi mélodique, mais sous forme cette fois d’expérience musicale collective pour un résultat d’un niveau rarement approché. Enregistré en 1987 à l’occasion d’une tournée américaine, probablement l’album sur lequel la complicité avec Dejohnette est la plus évidente.Enfin, en guise de cinquième album, il est difficile de faire l’impasse sur le quartet Européen où le pianiste côtoie celui qui deviendra l’autre grande vedette d’ECM, le saxophoniste norvégien Jan Garbarek. L’euphorique “Sleeper“, un double album enregistré en public à Tokyo en 1979 et sorti tardivement en 2012, donne une palette luxuriante des possibilités de ce quartet un brin mésestimé.

Et plus si affinité: Toujours au Japon et cette fois en solo, “The Sun Bear Concerts“, une série de 5 concerts solos enregistrés en 1976 et édité sous forme de coffret de 6 Cds (c'est pas donné mais faut pas hésiter si vous avez une petite rentrée d'argent). Là encore, comme beaucoup d’enregistrements en solo de ces années 70, 80 et parfois 90, on approche les cimes musicales. Si vous êtes un peu moins fortuné, se contenter du double  “Bremen-Lausanne“ voire du simple “Paris Concert“, autres témoignages d’un Jarrett en grande forme, et peut-être aussi une curiosité, “Gurdjieff. Sacred Hymns“, des interprétations de mélodies orientalisantes  chantonnées par le “philosophe“ ésotérique Georges Gurdjieff , recueillies et transcrites par Thomas de Hartmann, un de ses disciples musicien.

En trio, surtout ne pas faire l’impasse sur les indispensables “Standards Live“ et surtout “Still Live“ ainsi que le troublant “Bye bye Blackbird“ en hommage à Miles Davis avec qui il a joué durant un peu plus d’un an au début des années 70.  Au cours des années 1990 et 2000, il a livré pléthore d’album avec ce trio, et si l’on pourra parfaitement se passer du coffret Live “At the blue Note“, on pourrait éventuellement se rabattre sur “Whisper Not“, “The Cure“, “The out of Towners“ et surtout “Inside Out“. Difficile d’ignorer “Tresure Island“ et surtout  “Death and the flower“ du quartet americain, qui parvient presque à se hisser au niveau de  Survivor’s suite.

Les plus curieux pourront aussi explorer l’antiquité Jarrettienne, celle du temps ou le quartet americain n’était encore qu’un trio avec Haden et Motian, “Somewhere Before“ avec une reprise de “My Back Pages“ de Bob Dylan ou “Life Between the Exit Signs“, son tout premier album de 1967.

Voilà, c'est un peu long mais vous n'êtes pas obligé de tout lire, c'était à l'origine un billet de mon blog que j'ai remanié.
cordialement
pat55

[EUVRARD]

Intéressant

Ayant déja en vinyle les Standard vol 1 et 2 et "the kolhn concert" et CHANGELESS en CD, il ne reste plus qu'a compléter ma collection avec tes indications.

Merci

[PP_65]

Vu le prix ,pourquoi se priver :
https://www.amazon.fr/Keith-Jarrett-Imp ... tt+impulse
Le quartet US donc, avec le son US .
En piano solo, je garde de l'affection pour Staircase . Je n'ai pas abordé le fameux coffret au Japon ;  à l'époque de sa sortie , je n'avais pas les finances et désormais je suis passé à d'autres pianistes mais je ne désespère pas de m'y plonger .
En trio : le coffret live au Blue Note , plus introverti à mes oreilles que les enregistrements du début de cette formation ( qui me plaisent aussi )
Quartet EC : "my song"
Et un Jarrett qui n'est pas de Jarrett : "tales of another " de G. Peacock .

[lcartau]

Vu le prix ,pourquoi se priver :
https://www.amazon.fr/Keith-Jarrett-Imp ... tt+impulse
Le quartet US donc, avec le son US .
En piano solo, je garde de l'affection pour Staircase . Je n'ai pas abordé le fameux coffret au Japon ;  à l'époque de sa sortie , je n'avais pas les finances et désormais je suis passé à d'autres pianistes mais je ne désespère pas de m'y plonger .
En trio : le coffret live au Blue Note , plus introverti à mes oreilles que les enregistrements du début de cette formation ( qui me plaisent aussi )
Quartet EC : "my song"
Et un Jarrett qui n'est pas de Jarrett : "tales of another " de G. Peacock .

Oui j'étais assez étonné de ne pas trouvé "my song" dans la longue liste de notre ami.

Le fameux coffret au Japon, j'ai ça à la maison. C'est franchement un très beau disque. Je pense que ça te plairait. Treasure Island et Death and the flower également. Pas un mot sur Fort Yawuh ?

-- 11 Juil 2017, 18:19 --

Et pour le "My song" allez faire un tour sur youtube et écouté la version de 1978 au Japon solo qui n'existe pas en disque à ma connaissance...

[guy19]

Bonsoir,

Personnellement ,j'aime beaucoup le concert de Hambourg 72 ( cd ECM ) Jarrett joue également de la flûte et du sax soprano avec Haden et Motian.  Nous sommes bien loin du soporifique concert Köln.

Guy

[PP_65]

Treasure Island et Death and the flower également. Pas un mot sur Fort Yawuh ?

-- 11 Juil 2017, 18:19 --

Les trois sont dans le coffret de l' intégrale Impulse . Bien sûr je connaissais une bonne partie de ces disques en LP ;  F.Y. est très incomplet en vinyle .

[lcartau]

Oui tu as raison. Je l'ai également en CD. C'est un incroyable disque quand même...

[JérômeB]

En trio : le coffret live au Blue Note , plus introverti à mes oreilles que les enregistrements du début de cette formation ( qui me plaisent aussi )
Quartet EC : "my song"

Comme bcp, j'ai découvert K.Jarrett avec le Köln Concert.
Et tout de suite après, "My Song".

Difficile de parler de l'oeuvre de K. Jarrett sans parler du bonhomme ... Avec le temps, il a développé la même forme d'exigence (voire d'intransigeance) vis à vis de son public que vis à vis de son art du trio. Ce qui le rend parfois (souvent) imprévisible et fait trembler les programmateurs.

Dernier (?) exemple en date : il quitte la salle Pleyel après 20 mn de concert au motif qu'une personne dans le public toussait.
Concert (u)nique et non remboursé. Le public s'en souviendra ...

[lcartau]

Les échos des bénévoles qui l'ont croisé à Marciac sont également "peu élogieux" pour rester correct.

Miles était particulièrement atroce également.

[JérômeB]

Les échos des bénévoles qui l'ont croisé à Marciac sont également "peu élogieux" pour rester correct.

Miles était particulièrement atroce également.

Quand je pense à K.Jarrett, je pense immédiatement à Miles Davis.
Et pas pour des raisons musicales, hein ...

[peyrerouge]

Et le Keith "vous avez dit Classique"
avec ses variations Goldberg



et  un concerto de Mozart pour deux pianos avec C Correa, une drole d'affiche...

[PP_65]

Les échos des bénévoles qui l'ont croisé à Marciac sont également "peu élogieux" pour rester correct.

Miles était particulièrement atroce également.

La Dépêche avait parlé de caprice de star parce qu'il avait refusé les retardataires , le public qui parle ( parce que que trop rempli de magret et de St Mont) , les photographes et,  je crois,  le grand écran ; bref tout ce qui coupe de la musique : un type normal de mon point de vue .

-- 11 Juil 2017, 20:02 --

Il ne faudrait pas oublier qu'il n'était pas manchot avec l'électricité comme en témoignent ses disques avec Miles .

[pat55]

Dernier (?) exemple en date : il quitte la salle Pleyel après 20 mn de concert au motif qu'une personne dans le public toussait.
Concert (u)nique et non remboursé. Le public s'en souviendra ...

Pour sa défense, il a affirmé que c'était précisément un spectateur américain qu'il avait déjà repéré et qui n'en était pas, toujours selon Jarrett, à son coup d'essai.Il a par la suite affirmé qu'il n'en voulait pas au public français qui, comme tu l'as souligné, avait quand même payé sa place pour ...20mns de concerts.
Mais bon, je ne suis pas non plus son avocat.
Quand à “My Song“, plusieurs fois cité, j'avoue que j'ai toujours eu un peu de mal avec le phrasé et les mélodies de “prof de math“ de Jan Garbarek. Pourtant, je l'ai vu à plusieurs reprises et avait été plutôt agréablement surpris mais en disque, bof, bof. (désolé pour les éventuels profs de math sur le vert)

[PP_65]

"Garbarek rentre à l'université d'Oslo, où il étudie le polonais, la philosophie et la psychologie. Il désirait également étudier l'arabe et le sanscrit, mais le développement de sa carrière musicale le fait arrêter ses études"
Wikipedia .
Moi, je verrai davantage un lien avec ça :  https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Festin_de_Babette

[duke2]

https://youtu.be/r-qFKGowO_o


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[lcartau]

La DÃ[emoji767]pêche avait parlÃ[emoji767] de caprice de star parce qu'il avait refusÃ[emoji767] les retardataires , le public qui parle ( parce que que trop rempli de magret et de St Mont) , les photographes et,  je crois,  le grand Ã[emoji767]cran ; bref tout ce qui coupe de la musique : un type normal de mon point de vue .

-- 11 Juil 2017, 20:02 --

Il ne faudrait pas oublier qu'il n'Ã[emoji767]tait pas manchot avec l'Ã[emoji767]lectricitÃ[emoji767] comme en tÃ[emoji767]moignent ses disques avec Miles .

Et refuser que des bénévoles puissent assister sans payer aux concerts qui t'enrichissent parce que justement ils assurent gratuitement le suivi de ta venue ça correspond à ta conception de la chose ?
J'ai juste envie de dire que c'est un merveilleux pianiste et un gros con égotique...


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[PP_65]

https://youtu.be/r-qFKGowO_o


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Après avoir compris qu'il ne pourrait avoir le Nobel , il a repris le piano .

-- 12 Juil 2017, 00:45 --

Et refuser que des bénévoles puissent assister sans payer aux concerts qui t'enrichissent parce que justement ils assurent gratuitement le suivi de ta venue ça correspond à ta conception de la chose ?
J'ai juste envie de dire que c'est un merveilleux pianiste et un gros con égotique...


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Il faudrait que tu précises ce que tu entends par "la chose" . Si il  avait aussi refusé les rangs d'invités , dommage pour les bénévoles , mais j'approuve .

[lcartau]

On ne va pas forcément lancer le sujet ici, mais il faut être deux secondes lucides: 90% des concerts dans le domaine où Jarrett fait et a pu faire de la musique existent parce que des passionnés donnent de leur temps gratuitement. Qu'il ne le comprenne pas est d'une rare stupidité. Par ailleurs, les invités dont tu parles, sont des places offertes par les structures qui payent pour ces concerts. A ton avis, si Midi Py n'avait pas soutenu Marciac, Jarrett aurait il eu une occasion quelconque de se produire là? Alors oui bien sûr, les invités, des privilégiés de la caste des puissants ne comprenant rien à l'Art. Je te l'accorde, je préfèrerai aussi que ces places aillent à des lauréats de conservatoire ou d'écoles de musique.

Mais les bénévoles tout de même, sans eux la moitié de ce qui se fait en terme de politique culturelle et sportive n'existe plus dans ce pays.

[peyrerouge]

On ne va pas forcément lancer le sujet ici, mais il faut être deux secondes lucides: 90% des concerts dans le domaine où Jarrett fait et a pu faire de la musique existent parce que des passionnés donnent de leur temps gratuitement. Qu'il ne le comprenne pas est d'une rare stupidité. Par ailleurs, les invités dont tu parles, sont des places offertes par les structures qui payent pour ces concerts. A ton avis, si Midi Py n'avait pas soutenu Marciac, Jarrett aurait il eu une occasion quelconque de se produire là? Alors oui bien sûr, les invités, des privilégiés de la caste des puissants ne comprenant rien à l'Art. Je te l'accorde, je préfèrerai aussi que ces places aillent à des lauréats de conservatoire ou d'écoles de musique.

Mais les bénévoles tout de même, sans eux la moitié de ce qui se fait en terme de politique culturelle et sportive n'existe plus dans ce pays.

Je sens qu'on ne va pas tarder à évoquer ici les notaires...

[PP_65]

Je suis bien conscient du rôle des bénévoles ( j'en côtoie tous les ans à Luz) , cependant toute chose a son revers de la médaille , lorsque F. Marmande a émis quelques critiques sur la façon dont le public aborde la Jazz à Marciac, la direction est partie la queue basse et a exercé son droit de réponse avec un bénévole qui s'est entretenu avec Marmande ( dans Sud-Ouest il me semble) , pourquoi pas un vendangeur de Saint Mont tant qu'ils y étaient ? Ce revers, c'est donc la mise en avant de ce bénévolat ( ou aussi des retombées économiques) pour éviter les questions de fond sur la musique et la façon de l'écouter .
Les invités de Marciac, dans leur ensemble,  puent : en aucune façon ils n'ont le droit de passer devant les abonnés . Les structures , qu'elles soient publiques ou privées qui soutiennent le festival vivent soit avec l'impôt soit avec leurs clients , ils ne devraient pas l'oublier .
A luz, si tu veux être devant, tu arrives à l'heure , point barre .
PS : concrètement , je voudrais bien savoir ce que Jarrett a interdit aux bénévoles , il est venu avec son service d'ordre qui a empêché toute personne à 100 m à la ronde du chapiteau ? Que je sache, il n'a pas contrôlé les billets aux entrées  .